Que peindre, la question ne se pose plus, ou plus encore. Quand peindre, la question ne se pose plus, ou plus encore. Seul, peindre est à l’ordre du jour. Chaque son, chaque mot, chaque heure, forme une couleur. Je note, à ne pas oublier. Clin d’oeil aux instants notés, aux moments gravés, au passage d’un jour… Merde! ça m’a sauté dans l’œil, je le sens encore, …à… non c’est un moucheron…De l’objet… de l’œil, de l’œil… de l’esprit, de l’esprit… de la toile, de la toile… de la peinture, de la peinture… de l’œil, de l’œil… de l’émotion, de l’émotion… des mots.
Sarah, 2005
Seule dans mon atelier je peins, je pense , je m’arrête. Des pierres au mur, de la poussière, mon petit lieu…à moi… Du silence, puis le cri des enfants qui jouent dans la cour de l’école… de la vie, la sonnerie retentie… le silence. Seule dans mon atelier je peins, je pense , je m’arrête. Vivante d’émotions. Je pose ce pinceau sur ma toile… je m’éloigne.. Je m’évade, je ne veux pas oublier, jamais, alors je le peins…Bonheur de mettre au monde…Bonheur d’une création…
Sarah, 2006
« Maman? »…une petite voix résonne de l’autre coté du mur…Fin de la sieste ma fille se réveille. Je crée , je peins , je materne, ma fille, ma vie.. De la peinture plein la figure, plein les doigts, ma fille monte et s’émerveille,Je m’émerveille, mon ange, Je peins. Maman peintre, étonnant… détonnant… émouvant… éprouvant…
Sarah, 2006
Sur la route, nous partons, voir la beauté du monde… En voiture, coté passager, je m’évade,.. encore… Lignes électriques, linges humides, quelle poésie urbaine, ou trop humaine…Attention, ça freine, le camion, les éoliennes… Paysage unique, paysage publique, paysage ludique…te me nourries, me fais sourire, me fais bouillir. Vite quelque chose pour croquer tout çà… à l’angle du 10 décembre je griffonne, pense bête, marque mémoire, il ne faut pas oublier… jamais! On s’arrête. Pose pipi.
Sarah, 2003
Chez mamie, il y a la boite à bonbons, sur la table basse, prés du feu… Non tu n’en prends qu’un !… Après ça fait mal au ventre… Les bonbons c’est si bon… et un pour papi pendant la pub, deux, trois, quatre…Le dentiste pour papa… fini les bonbons… pourtant c’est si bon. Sucrées… acidulées… tendrement pétillantes… Des couleurs pour chaque instant….
Sarah, 2006
Ce soir, j’ai mis du rouge sur mes lèvres, de la peinture plein les doigts et je suis sortie…Femme… Fille… Maman… Femme… Peintre … Femme… Je suis… Je sourie.. Je rie.. je pleure.. j’ai pleurée… je crée… J’avance… Femme… je crée… Je suis…Femme… Je vie
Sarah, 2008
Je t’aime, Tes yeux…
Je t’aime, Un enfant…
Je t’aime, Ta bouche…
Je t’aime, Deux enfants…
Je t’aime, Tes mains…
Je t’aime, Trois enfants…
Je t’aime, Mon homme…
Sarah, 2013
Signifier sans trop en dire, en dire assez pour signifier. Peindre. Paysage tu me regardes, visage tu me parles, ma vie, mon esprit. Je prends note et je croque, j’ai peur de l’oubli. Je me souviens ces instants, je peins. Je me souviens au début, je peins.
Sarah, 2005
Ce que je peins ? Ce qui m’entoure, ceux qui m’entourent. Ce que j’ai vu, ce que j’ai lu. Mais pas tout. Comment je vois ? Avec mes yeux, et ceux du temps. Avec mes yeux, et ceux des lieux. Avec mes yeux, et ma mémoire. Avec mes yeux, et ceux du monde.
Sarah, 2002
Que dit le peintre ?
Que répond le miroir ?
La peinture de Sarah Maurette s’impose à nous comme un jaillissement de couleurs et de formes car c’est bien de couleurs dont il s’agit ici. chacune d’elle déroule leur présence sur la toile, et deviennent petit à petit autonomes. Le regard ne s’arrête jamais, où alors, s’il cesse de progresser c’est pour mieux se faufiler à travers des formes connues ou inconnues, toujours à découvrir.
La peinture puise son existence dans une singulière réalité. Quand on croit apercevoir une bouteille de Morandi ou une composition de Nicolas de Staël, c’est Sarah Maurette qui pose sur ses maîtres un pinceau imprégné de sa propre histoire.
Histoire d’un art de peindre et de dire les choses.
Histoire de la photographie, de l’image, héritée de son enfance.
Les lignes fuient ici pour mieux réapparaître ailleurs. Un ailleurs proche de nous, de notre éblouissement. Ni douce, ni dure, mais juste. Oui, la peinture de Sarah Maurette est juste. Elle entre dans l’histoire quotidienne en posant sur les objets familiers, un regard bienveillant et intelligent. Elle ne trahit jamais son sujet, elle en fait un instrument de désir et de rêve de désir, comme une aventure intérieure qui se projette dans un lieu infini.
Les lignes de fuite ne fuient pas tout à fait, elles traversent l’espace immense de la toile, les courbes n’enveloppent pas vraiment, elles libèrent, le rouge n’éblouit pas, il console, le blanc n’est jamais neutre, tantôt bleu, tantôt gris ou vert, il appartient au monde de la terre.
Si les paysages sont électriques, les linges étendues au vent, les fruits posés dans l’espace, la liberté qu’ils acquièrent, ils la doivent à la matière dont sont faites les couleurs. La forme et la couleur se disputent en un combat régulier les préférences du peintre.
C’est ainsi que les toiles de Sarah Maurette trouvent leur destin dans notre regard enfin libéré des contraintes de la norme.
Willy Azra, 2007
Dentelles de Friandises
Bonsoir Sarah, dans la continuité de notre discussion lors du vernissage de ton expo, j’essaie de traduire la sensation eue et l’émotion suscitée par ton tableau. Il est vrai que traduire c’est trahir, mais je me livre à cet exercice.
Cette oeuvre m’a fait penser d’abord à la vie, aux expériences cumulées, accumulées qui bâtissent notre chemin dans l’inconnu, et surtout vers l’inconnu, le lendemain. Par contre on y va un peu plus expérimenté que l’avant veille, que la veille car un petit caillou est venu se rajouter, renforcer ce chemin. je dis renforcer car les expériences les plus belles, comme les plus amères, les rencontres les plus enrichissantes comme les plus détestables y ont apportées leur part sur notre voie.
Le fait qu’elle soit exposée devant un mur en pierre m’a conduit vers la gravitation. Ton tableau me parle de cela d’ailleurs, la limite n’est que vers le haut, le bas du tableau est ouvert et la caractéristique de cette force est d’attirer tout objet vers le bas, jamais vers le haut.
Et deuxième caractéristique est qu’elle régit tous les équilibres dans l’espace, grâce à deux résultantes de cette force l’attraction et la répulsion, et ramenée à ton tableau, je la transpose de la manière suivante :
Tous ces petits cailloux (5 expériences) sont régis par l’attraction et la répulsion :
Les gens de qui je dois me rapprocher.
Ceux que je veux fuir mais sans les oublier pour éviter d’autres aussi détestables pardon d’être autant détestable qu’eux, je garde en mémoire leur bêtise ils sont là et m’ont enrichi car m’ont éclairé sur ce qu’il faut éviter d’être.
Et puis ces expériences qui m’ont apporté tant de joies et que je dois partager avec les autres.
Et ces moments honnis mais qui m’ont donné les clés pour que demain je ne retombe pas dans leur piège, leur amertume. ils m’ont enrichi quand même et le fait qu’il n’y ait pas de bordure en bas ouvre la possibilité à d’autres expériences à se rajouter, à d’autres apprentissages à venir, le chemin reste vers l’inconnu.
Mustapha Mokdad, Avril 2015